...et querelles.
Cela faisait maintenant une semaine que Alberto avait posé cette question à son père et celui-ci avait essayé milles façon d’aborder le sujet en douceur avec Cunéguonde, mais sans succès. Le matin de l’anniversaire du petit garçon, Alban pris son courage à deux mains et téléphona à Consort sans l’avis de sa femme. Après tout, quand il serait là, elle ne pourrait pas le renvoyer. Et de toute façon la dispute qu’ils auraient ne serait pas si différente. Et puis il faisait aussi ça pour Ariel. Par le plus grand des hasards, elle était née le même jour que son grand frère. C’est Isabella qui décrocha :
" Allô ? Qui est à
l’appareil ?
- Bonjour madame, je me
présente, Alban Capp. Vous êtes Madame Monty je présume ?
- Oui… Vous voulez sans doute
parler à Consort ?
- Oui, est-il là ?
- Attendez, je vais le chercher.
- Merci. »
Il
attendit quelques instants avant d’entendre de nouveau une voix à l’autre bout
du téléphone.
« Allô, Alban ? Que
me vaut le plaisir de votre appel ?
- Vous savez sans doute que
c’est l’anniversaire d’Alberto et d’Ariel aujourd’hui.
- Oui, comment oublier une telle
date. J’allais justement leur faire envoyer un petit quelque chose.
- Cela vous dirait de venir leur
apporter en main propre ?
- Euh… Oui, pourquoi pas ?
Mais…Cunéguonde est au courant…Cela m’étonne qu’elle accepte que je vienne…
- Non, elle n’est pas au
courant, mais Alberto vous réclame.
- Bon, dans ce cas, d’accord, je
viendrais…
- Je vous laisse, je crois avoir
entendu Cunéguonde…
Effectivement, quelques
instants plus tard, sa femme apparut à la porte du salon pour demander qui
pouvait bien appeler sous prétexte qu’elle attendait un coup de fil de sa sœur.
Faute de coup de fil, elle eut droit à une visite de sœur plus tard dans la matinée. Celle-ci avait quelque chose de très important à dire à sa Cunéguonde mais elle avait finalement préféré lui dire en personne, c’était beaucoup plus facile pour elle. Cunéguonde était très contente de revoir Morgana et elle ne put s’empêcher de la prendre dans ses bras dès qu’elle la vit. Morgana était en effet parti quelques temps de Véronaville avec son mari pour changer d’air et avait coupé tout contact avec sa famille. L’éternelle querelle Capp/Monty les étouffait. Mais un travail intéressant dans un grand laboratoire de la ville les avait fait rentrer au pays il y avait seulement quelques jours. Elle venait maintenant aux nouvelles auprès de sa grande sœur qui ne lui en voulait pas le moins du monde. C’est qu’il s’en était passée de choses durant son absence et Cunéguonde adorait raconter les histoires de voisinages !
Elles s’assirent
confortablement dans la causeuse du salon où elles étaient sûres de ne pas être
dérangées par les pleurs d’Ariel. Elle était peut être sur le point de devenir
une grande fille, elle n’en restait pas moins capricieuse.
Elles discutèrent pendants
des heures et des heures. Morgana fut assez étonnée d’apprendre le remariage de
son père. Elle n’avait rien contre la matriarche Monty mais il était bizarre
pour elle d’apprendre qu’une partie au moins des familles Capp et Monty s’était
réconciliée. Mais elle fut encore plus surprise d’apprendre qu’elle avait une
nouvelle petite sœur ! Cependant, elle fut obligée de cacher son
excitation pour ne pas froisser sa sœur. Elle connaissait les sentiments de
Cunéguonde envers la famille Monty et malgré tout le respect qu’elle avait pour
elle, elle ne les approuvait pas.
Puis ce fut à Morgana de
raconter à sa sœur ce qu’elle ne savait pas. Tout d’abord, elle avait retrouvé leur
frère Carlo, qui était parti sans laisser de traces lui aussi, et avait réussi
à le ramener avec elle, à Véronaville. Il était maintenant chez elle, mais ne
désirait pas pour l’instant renouer des contacts avec sa famille.
Mais ce qui fit le plus plaisir
à Cunéguonde, ce fut d’apprendre que Morgana allait bientôt donner la vie. Elle
allait enfin donner une descendance à son mari et par la même occasion
perpétuer la lignée des Capp et venait chercher conseil auprès de sa grande soeur.
En raccompagnant Morgana à
la porte, Cunéguonde aperçut Desdémone en bien mauvaise compagnie selon elle.
La petite fille avait invité en toute innocence le fils de Bianca Monty.
Cunéguonde le reconnut tout de suite parce que sa mère avait eu l’audace de
s’installer juste en face de chez elle et avait, par la même occasion, incité
son frère Antonio à faire de même. Le quartier des Capp était envahi de Monty.
Elle pensait qu’ils voulaient plus encore et qu’ils visaient le manoir.
Mais elle était prête à se battre pour
qu’ils ne mettent jamais la main dessus. En attendant, elle usa de toute la
méchanceté qu’elle avait en elle pour renvoyer le petit Dan. Desdémone n’osa
même pas protester. Elle connaissait sa mère et savait qu’il ne fallait pas
discuter. Elle n’avait pas encore l’âge où l’on se croit capable de défier ses
parents. Morgana quant à elle, partit tout de même avec un sourire au coin des
lèvres. Sa sœur n’avait pas réussi à inculquer haine des Monty à ses enfants.
Pendant ce temps, Alban
attendait avec anxiété le moment où Consort Capp sonnerait à la porte. Pour
s’occuper, il avait préparé deux magnifiques gâteaux qui laissaient planer une
odeur de fête. Le soir se mit à tomber et vers 19 heures, il entendit ce qu’il avait tant redouté. Il se dépêcha
d’aller ouvrir. C’était bien le père de Cunéguonde. Il avait l’air aussi
stressé qu’Alban. Ses mains étaient moites et il hésitait à rentrer. Il demanda
plusieurs fois à Alban s’il était sûr de ce qu’il faisait, Il était encore
temps pour lui de faire marche arrière. Il rentra cependant et lorsque
Cunéguonde le vit, Alban sentit bien qu’ils allaient passe un mauvais quart
d’heure tous les deux. Mais lequel subirait sa colère en premier, il ne le
savait pas. Au moins, pour l’instant, elle se retenait à cause des enfants.
Ariel et Alberto soufflèrent
tout de même leurs bougies dans une ambiance tendue. Même si les adultes
faisaient tout pour cacher le malaise entre Cunéguonde et son père, ils
s’apercevaient quand même que quelque chose n’allait pas. Il fut dur pour eux
d’ouvrir leurs nombreux cadeaux dans la joie et la bonne humeur. Après le
repas, Cunéguonde envoya tout ce petit monde se coucher. C’était peut être un
jour de fête mais il ne fallait pas oublier que le lendemain, ils avaient
école. Et puis, une fois ses enfants couchés, elle pourrait laisser éclater la
colère qu’elle avait gardée depuis le début de la soirée.
Et effectivement, ce
soir-là, elle dit à son père tout ce qu’elle avait sur le cœur. Sa trahison
envers sa famille, sa folie d’avoir adopter une fillette, à son âge. Mais ce
qui l’avait le plus déçu en lui, c’était qu’il portait le nom des Monty. Il
avait abandonné le nom prestigieux des Capp pour prendre celui des paysans
qu’étaient les Monty pour elle. Elle ne pouvait pas imaginer qu’il renie tout
ce que sa mère lui avait apporté. La femme pour qui il s’était brouillé avec
Patrizio, la femme avec qui il avait eu des enfants…
Mais Consort ne se laissa
pas faire et il profita de l’occasion que lui offrait sa fille pour lui dire
ses quatre vérités. Lui aussi n’en pouvait plus de son comportement. Ne
pouvait-elle pas laisser ses préjugés de côté et rencontrer les gens
merveilleux que lui avait découverts ? C’était lui qui avait enseigné à sa
fille la haine des Monty. Et maintenant, il lui demandait de pardonner. Ne
pouvait-elle pas faire simplement ce qu’on lui disait, comme quand elle était
petite…
La querelle se prolongea
toute la nuit…
Une semaine qui se finissait
comme elle avait commencé : par une querelle. Alban se demanda si un jour,
il pourrait y avoir un peu de calme et sérénité dans sa maison.